[La conscience] est le savoir revenant sur lui-même et prenant pour centre la personne humaine elle-même, qui se met en demeure de décider et de se juger. Ce mouvement intérieur est dans toute pensée ; car celui qui ne se dit pas finalement : «Que dois-je penser ?» ne peut pas être dit penser.
La conscience est toujours implicitement morale ; et l'immoralité consiste toujours à ne point vouloir penser qu'on pense, et à ajourner le jugement intérieur. On nomme bien inconscients ceux qui ne se posent aucune question d'eux-mêmes à eux-mêmes. Ce qui n'exclut pas les opinions sur les opinions et tous les savoir-faire, auxquels il manque la réflexion, c'est-à-dire le recul en soi-même qui permet de se connaître et de se juger ; et cela est proprement la conscience.
Rousseau disait bien que la conscience ne se trompe jamais, pourvu qu'on l'interroge. Exemple : ai-je été lâche en telle circonstance ? je le saurai si je veux y regarder. Ai-je été juste en tel arrangement ? je n'ai qu'à m'interroger; mais j'aime bien mieux m'en rapporter à d'autres.
Alain, « Définitions », dans Les Arts et les Dieux, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade », 1958, p. 1045.
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