XXXIII- Consentement universel est-il preuve de vérité ?
On peut m’objecter que le consentement des hommes de tous les temps et de tous les pays n’est pas une preuve de la vérité. Tous les peuples ont cru à la magie, aux sortilèges, aux démoniaques, aux apparitions, aux influences des astres, à cent autres sottises pareilles : ne pourrait-il pas en être ainsi du juste et de l’injuste ?
Il me semble que non. Premièrement, il est faux que tous les hommes aient cru à ces chimères. Elles étaient, à la vérité, l’aliment de l’imbécillité du vulgaire, et il y a le vulgaire des grands et le vulgaire du peuple ; mais une multitude de sages s’en est toujours moquée : ce grand nombre de sages, au contraire, a toujours admis le juste et l’injuste, tout autant, et même encore plus que le peuple.
La croyance aux sorciers, aux démoniaques, etc., est bien éloignée d’être nécessaire au genre humain ; la croyance à la justice est d’une nécessité absolue : donc elle est un développement de la raison donnée de Dieu, et l’idée des sorciers et des possédés, etc., est au contraire un pervertissement de cette même raison.
Voltaire, Le philosophe ignorant, chap. XXXIII
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire