En parcourant les fécondes sottises de Lambert Schenckel, j’ai réfléchi qu’il me serait facile d’embrasser par l’imagination tout ce que j’ai découvert : à savoir, par le moyen d’une réduction des choses aux causes ; lesquelles toutes réduites finalement à une seule, il est clair qu’il n’est nul besoin de la mémoire pour toutes les sciences. Car, qui comprendra les causes, reformera facilement en son cerveau, par l’impression de la cause, des fantômes tout à fait effacés ; tel est le véritable art de la mémoire, tout à fait opposé à l’art de cet imbécile : non que son art soit sans effet, mais il envahit tout le papier qu’il faudrait employer mieux et il ne s’établit pas dans le bon ordre ; lequel ordre consiste en ce que les images soient formées selon des rapports de dépendance réciproque. Quant à lui, il omet précisément, je ne sais s’il le fait exprès ce qui est la clef de tout le mystère.
Pour moi, ma réflexion m’a conduit à un autre procédé : ce serait à partir d’images des choses qui ne soient pas sans lien entre elles, de s’appliquer à ajouter de nouvelles images communes à toutes, ou du moins de les réunir toutes ensemble en une seule image, qui n’aurait pas de rapport seulement avec la plus proche, mais aussi avec les autres. Aussi la cinquième ferait référence à la première en passant le javelot jeté par terre, celle du milieu par l’échelle d’où elles descendraient, la seconde par un trait projeté vers elle et la troisième serait dans un rapport semblable, en fonction d’une signification véritable ou figurée.
Descartes, Cogitationes privatae (1619-1621), AT, X, p. 230.
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